ACES EXPERIENCE 2020
Nous y pensions depuis un an et jusqu’au bout, covid oblige, nous étions dans l’incertitude la plus complète. Et nous avions raison de nous en faire, car sur place, nous avons appris que les autorités locales n’ avaient donné leur aval que le mardi, pour un événement qui débutait le jeudi suivant…
C’est donc fébriles, mais le sourire aux lèvres que nous nous sommes retrouvés ce jeudi 10 septembre 2020 pour vivre et partager une aventure extraordinaire.
Jour 1 : « La transhumance ».
06H00, nous nous sommes donnés rendez-vous sur l’A.1, à proximité de la gare de péage de Fresnes-les-Montauban. Il fait encore nuit noire en cette fin d’été, et certain(e)s d’entre nous ont encore le visage zébré des stigmates laissés par un sommeil court et profond.
Nous sommes 7 à nous retrouver là ; Archibald, la Dame-pilote, Jean-Mich’, le Rusé, Laurent, le Flamboyant et moi. Obélix et celui qui dorénavant se fait appeler « Dédé », ont rejoint Ti’Fred à Paris la veille pour y faire escale, afin de décomposer le trajet en deux étapes. Quant à Katia et Gillou, étant en vacances à proximité du site des Aces, ils sont déjà sur place, et se sont très gentiment proposés de s’occuper des premiers achats indispensables à notre installation. Grâce leur en soit rendue !
Tout se passe de la meilleure des façons possibles jusqu’à ce que nous arrivions aux abords de la capitale. Il est 08H00 ce jeudi matin et la circulation est particulièrement dense. Notre Road Cap’ prend la décision de contourner la mégapole par l’ouest et pour ce faire, emprunte l’A.86 en passant par Colombes et Nanterre. Arrivés à hauteur de Rueil-Malmaison, le duplex s’offre à nous. Pour information, ce tunnel qui a la réputation d’être le plus cher de France, est réservé aux seuls V.P. Les PL et les motos y sont personæ non grata. Encore fallait il prêter attention à la signalétique en place, ce que nous n’avons pas fait. Ceux qui sont équipés d’un badge télépéage franchissent l’obstacle sans probléme. Archi parvient à s’acquitter de son droit de passage de manière classique et quand arrive mon tour, j’exécute la manip’ d’usage, mais rien n’y fait, la barrière reste obstinément horizontale devant moi. J’actionne donc le bouton d’appel, et au bout de quelques secondes, une voix féminine m’informe que l’accès au duplex est interdit aux motos et que je dois faire marche arrière pour emprunter une voie de dégagement m’amenant à Bougival. Au bout de quelques minutes et après avoir tout essayé (soudoiement, charme, révolte, biker lives matter, etc…), deux de mes camarades d’infortune et moi, nous résolvons à affronter la jungle urbaine.
À partir de là, « Demmerden zizich ! » comme ils disent de l’autre côté du Rhin (Enfin je crois..!). Après maintes tentatives infructueuses de garder le cap, nous avisons un policier municipal occupé à sécuriser un passage piéton jouxtant une école.
Le fringuant fonctionnaire, autant zélé que masqué, se fit alors un devoir de nous indiquer le chemin pour reprendre l’A.86. Au bout du 67éme changement de direction et du 34éme rond-point, Tom perd son sang-froid et jette l’éponge. Il décide alors d’interpeller un motard local, un frère de la route, qui pourrait nous sortir de la panade. Le sort a voulu que celui qui s’est arrêté ne connût que le fameux Duplex et que pour nous rendre où nous voulions aller, il fallait impérativement passer par Paris… CQFD. On comprend mieux pourquoi on voit très peu de bécanes immatriculées en 75 dans nos belles régions.
Aux grands maux, les grands remèdes, nous sommes trois pilotes chevauchant des motos équipées de GPS, il n’y a qu’à s’en servir ! Alors là, grosse poilade, tandis que nous sommes sur un rond-point, nos 3 GPS de marque identique et rigoureusement paramétrés de la même façon indiquent… 3 directions différentes.
S’ensuit alors un périple nous amenant à découvrir : La Celle-Saint-Cloud, Le Chesnay, Versailles, Jouy-en-Josas, Villebon-sur-Yvette, Orsay… jusque Dourdan. Quel merveilleux voyage n’est ce pas ? Le tout dans une circulation compacte, en côtoyant de charmant(e)s conduct(rice)eurs, souriant(e)s, affables et détendu(e)s. Résultat: 01H30 perdue, que du bonheur !
Pendant ce temps, nos autres compagnons de voyage cheminent tranquillement sur l’A6 en direction de Nevers où nous nous sommes donnés rendez-vous pour la pause déjeuner.
Bien que le temps perdu ne se rattrape pas, il nous faut quand même tout mettre en œuvre pour limiter les dégâts et rattraper l’A.77. Pour ce faire, nous traçons une belle diagonale qui nous amène à Étampes, pour traverser le Gâtinais, Pithiviers et Montargis.
12H45 viennent de sonner quand nous béquillons à Nevers, sur le parking du resto. Nos camarades ne sont là que depuis une vingtaine de minutes, tandis que les « Parisiens » viennent à peine d’arriver.
Nous roulons dans discontinuer depuis près de 07 heures et la pause roborative est la bienvenue. L’énergique maîtresse de céans, tatouée comme un docker, n’est pas personne qui s’en laisse compter, et c’est à la baguette, mais avec bienveillance qu’elle oit nos bruyantes retrouvailles ponctuées de quelques blagues « carambar ».
Désormais rassasiés, il est temps pour nous de reprendre la route direction Bourbon-l’-Archambault (ça ne s’invente pas) puis Montmarault, afin d’un emprunter l’A.71.
Là, comme à l’accoutumée, nous nous regroupons dés le péage franchi afin de reconstituer une rame digne de ce nom. La densité du trafic, comme la promptitude et le mode de paiement de chacun font que plusieurs minutes s’écoulent entre le premier et le dernier d’entre nous. Et c’est ainsi qu’Obélix décida d’éteindre le moteur de sa machine, à juste dessein de limiter son empreinte carbone et son impact sur l’environnement. Ce dont il n’avait pas pris garde, c’est qu’il avait effectué cette manœuvre à quelques dizaines de mètres à peine d’un relais télécom dont sont particulièrement friands les transpondeurs de nos machines favorites.
Alors qu’Archi nous lançait le rituel : « Tout le monde est là.. ? Moteurs en route, on est repartis… ! », le son strident d’une sirène se fit entendre.
Interloqué et la mine déconfite, Obélix s’échinait sur le démarreur, en vain ! Rapidement, un cercle se fit autour du naufragé, chacun y allant de son conseil. « C’est les piles ! » dit l’un, « Essaie de la démarrer à la poussette ! » dit un autre. On entend tout et son contraire : « Il faut mettre une couverture de survie sur l’antenne », « C’est l’essence qui remonte dans le klaxon », « C’est les freins de l’embrayage qui collent », « C’est un coup des Chinois… », etc…
Finalement, après avoir changé la pile, composé 28 fois le code confidentiel, s’être isolé entre deux semi-remorques et avoir brûlé 3 cierges en invoquant William Harley et Arthur Davidson, décision est prise d’éloigner la moto le plus possible de ce relais.
Comme dit l’adage : « On ne change pas un trinôme qui gagne… », et c’est ainsi que Dédé et Ti’Fred, dûment revêtus de leurs chasubles écarlates et retro-réfléchissantes, ont poussé Obélix et sa meule sur la B.A.U jusqu’à 1000 mètres de là.
Finalement, grand bien leur en a pris car, 15 minutes plus tard ils étaient de retour le visage rougeaud et dégoulinant de sueur (le thermomètre affichait 29 °C) mais avec le sourire aux lèvres. La moto avait enfin accepté de démarrer et la transhumance pouvait reprendre son cours.
Plus tard, durant notre séjour, Obélix avouera à demi-mot que lors de la vérification de la pile, il avait replacé celle-ci à l’envers…
Au fil des kilomètres et plus nous nous rapprochons du site, les équipages motocyclistes se font plus nombreux, signe avant-coureur qu’une manifestation festive se déroulait dans le coin, et pour cause !
Murols (63) est maintenant à un jet de pierre et nombre d’entre nous ne seront pas fâchés de béquiller après cette journée de roulage. C’était sans compter sur Archibald et son sens aigu de l’aventure jumelé à un amour inconditionnel de la nature. Et c’est ainsi qu’après avoir questionné un garde forestier indigène (NDLR : Information rigoureusement exacte), il nous emmena sur un chemin de terre tout juste carrossable, sillonner les forêts avoisinantes pour, au bout de quelques kms, arriver sur le site par une porte dérobée, assoiffé et couvert de poussière. Sacré Archi, toujours prêt à tester ses ouailles et à nous faire des farces. À moins qu’il ne se soit réellement planté si prêt du but.. ? Mais ça, je ne peux pas le croire !
Il nous faut maintenant valider nos réservations et céder aux modalités d’enregistrement. Au passage, nous retrouvons Katia et Gillou qui, en êtres censés, attendaient notre arrivée au bord de la seule et unique route qui mène au camping et qui, était empruntée par la (presque) totalité des bikers.
Après avoir pris possession de notre « Welcome pack » composé d’un road-book, d’un laissez-passer et quantités de goodies, nous nous dirigeons vers notre lieu de villégiature pour les 3 prochaines nuits.
Les bungalows sont de bonne facture, correctement équipés et parfaitement fonctionnels pour l’usage que nous en aurons.
Après l’attribution de nos puciers respectifs et un rapide déballage des affaires, c’est avec un plaisir non dissimulé que nous nous réunissons, les 13 que nous sommes, autour d’un rafraîchissement, sur la terrasse, pour savourer un instant rare.
Outre la découverte du site privatisé, très propre et agréable à parcourir, nous décidons de remettre le magasinage à plus tard et axons notre effort sur les stands dédiés à l’alimentation. Le dicton ne dit il pas ; « Un motard, ça n’a pas de cœur, mais ça a deux estomacs… ».
le reste de la soirée a été consacré à une montagne de fous-rires, d’histoires drôles et d’anecdotes piquantes. Ça y est, nos ACES avaient commencé !
Jour 2 : « La découverte »
Après une courte nuit, la vie reprend dans les bungalows. Le jour n’est pas encore levé que déjà, nombre de motos « tournent » dans la place. Certains participants sont arrivés tard la veille au soir, tandis que d’autres débarquent tout juste…
Sis à 35 kms du site de Gergovie, notre lieu de villégiature est situé au cœur du parc naturel régional des volcans d’Auvergne. Région absolument magnifique, sauvage et encore en partie préservée du monde de fous dans lequel nous vivons. D’aucuns diront de ce lieu « Ça me fait penser à… » ou « On dirait… » foutaises ! L’Auvergne, elle est unique ! Mais il n’est pas impossible que certaines régions à travers le monde puissent lui ressembler…
La veille au soir, emballé par le cadre de verdure où nous gîtons « Le flamboyant » s’est laissé aller à pousser la ritournelle. Tout lui était prétexte et maints styles étaient employés ; De la bergerette à la beuglante, en passant par la canzonette, la vilanelle, le rock ou la country.
Nous trouvant en terres Arvernes, dans les traces de Vercingétorix, il ne nous en fallait pas plus pour rebaptiser notre troubadour en … Giovannix le barde. Et comme dans une célèbre B.D, il ne nous restait plus qu’à le bâillonner et trouver un arbre pour l’y attacher…
Cependant, entre deux couplets, notre « Trouvère du Pévèle » avait pris le temps de nous confectionner un pain artisanal, sur la base d’une recette multiséculaire. Cette généreuse attention nous a profondément touché et j’ai cru voir poindre une larmichette d’émotion au coin de l’oeil de certains d’entre nous. D’autres aussi avaient le quinquet humide, mais consécutivement à la douleur occasionnée par la perte d’une canine après avoir tenté une morsure dans la coriace biscotte.
Interrogé sur les ingrédients composant son bricheton, l’artiste-boulanger nous énonçât entre autres : du ciment de Portland, du gravier de marne et un soupçon de toile émeri. Toujours selon lui, au Portugal, les plâtriers se serviraient de ce pain pour poncer les murs. Au temps des gaulois, les paysans en recouvraient les toits des maisons en lieu et place des lauzes, bien moins solides. On raconte même qu’il pourrait être à l’origine de la disparition de l’Atlantide, mais là…. Il y a des limites quand même ! Les gens sont d’une méchanceté… Tout le monde sait qu’ils sont tous morts d’ennui en écoutant des chansons…
Non, blagues mises à part, c’était une délicate attention de la part de notre Giovannix, et son pain était très bon…
Il est 09H00, les motos sont nettoyées, les pilotes aussi ! Après avoir pris un solide petit-déjeuner (Voir ci-dessus), 10 d’entre nous ont décidé de se lancer à la découverte de la région. Le trinôme légendaire souffrant probablement de gerçures à une partie charnue de leur individu tout en déclarant être épuisé après avoir parcouru 450 kms la veille, opte plutôt pour une journée au bord de la piscine. C’est une option qui se respecte, et chacun doit prendre son plaisir là où il le trouve.
Tout le monde le sait, pour qu’une sortie ait plus de chances d’être appréciée, elle doit être bien préparée. Du coup, avant de nous lancer dans l’aventure, il faut passer par la case Carte/Road-book. La nature, les virolos, les sites classés, tout nous fait envie, et en plus la météo est de la partie avec une température annoncée à 29 °C.
J’ hésite entre un pèlerinage à Cunlhat où, de 1988 à 2001 se tinrent les plus grands rassemblements de H.D en Europe, et Riom où l’on peut visiter un extraordinaire musée de la moto que j’ai moi-même découvert l’année passée.
Finalement, j’opte pour des routes de moyenne montagne à très fort potentiel touristique, offrant moult panoramas et séries de virages à n’en plus finir, le tout sur une distance de 150 kms. Certes, les mécaniques vont souffrir, mais les pilotes aussi, et c’est un peu ce qu’on est venu chercher après tout, non ?
Il est midi et nos estomacs commencent à se rappeler à notre bon souvenir. À Rome, on fait comme les romains qu’y disait !!! Et en Auvergne alors, on fait quoi ? Hé bien, on se mange une bonne truffade pardi ! Quelques uns connaissent la valeur énergétique du frichti et font prudemment l’impasse en cette journée caniculaire. D’autres, plus aventureux et aux papilles curieuses, se laissent tenter. J’ai encore le souvenir de Jean-Mich’ suant à grosses gouttes devant une assiette pleine à ras bord. Pour sûr, la digestion s’annonce compliquée cet après-midi.
Un café, l’addition et hop, en route. Les paysages à couper le souffle et les virages s’enchaînent sans fin. De retour au camping, nous faisons fi des « pneus carrés » après un long trajet sur autoroute. Aujourd’hui, nous nous sommes employés à les raboter sur les côtés comme il se doit. Qu’en sera t’il du run de demain ? J’ai hâte !
Durant la journée, de nombreux équipages nous ont rejoint sur la base des « Aces ». l’événement est ouvert aux possesseurs de toutes les marques moto, mais sont principalement représentés les trois constructeurs partenaires qui sont HD, Indian et BMW, en plus du manufacturier Michelin qui joue le régional de l’étape.
De nombreux stands sont tenus par des préparateurs, marchands de vêtements, barbiers et autres associations en tous genres.
Les organisateurs annoncent environ 1000 équipages participant à l’événement. Tout ce petit monde déambule paisiblement dans les allées en respectant majoritairement les mesures de précautions sanitaires en vigueur.
Diverses attractions ont été supprimées avec la présence sournoise du Covid, l’espace dédié au concert est clairsemé, au même titre que les buvettes et autres stands liés à l’alimentation où quelques rares « mange-debouts » accueillent des petits groupes d’affamés.
Nous retrouvons notre trinôme de l’extrême, et la meute est à nouveau au complet. Chacun y va de son ressenti sur la journée, Giovannix nous joue un air d’harmonica en exécutant quelques tours de magie dont il a le secret (Il sait tout faire notre Gio…), Obélix anime un débat sur les manetons de vilebrequins HD tandis que Tom et Dédé se disputent le titre de « meilleur prospect… ».
Dans cet univers très « typé » qu’est le monde de la moto, où le cuir est de mise, au même titre que les grosses bagouzes, piercing et autres tatouages plus ou moins réussis, je me dois de vous narrer la prestation prochronique et décalée de notre ami Christobal Le Rusé.
En effet, le zébre étant un fervent défenseur de l’élégance à la Française, il s’est totalement désolidarisé du L.E.C (vestimentairement parlant), en refusant de porter une tenue Ad Hoc pour déambuler sur ce site à fort quotient motocycliste. En dépit de tous les usages, c’est en T-Shirt et short FIFA, tongs et chaussettes, que notre mannequin d’un jour s’est promené dans les allées. Vous pensez bien qu’en un lieu comme celui là, où même les maitres affublent leurs chiens d’accessoires en cuir et où seuls les nourrissons ont les genoux apparents, notre « Rusé » était presque devenu une attraction, tel que ; la femme à barbe, le yéti, bigfoot ou Linda de Sousa ! Rien que pour ça je dis : « Big up pour Le Rusé ! ». Mais quand même, la prochaine fois, préviens nous quoi… histoire de nous préparer mentalement…
De retour dans nos lares temporaires, la totalité du groupe a participé à une veillée où le monde fut refait à maintes reprises, le tout ponctué de chansons dont nous ignorions l’existence… (Merci Giovannix!)
Jour 3 : « Le run »
C’est le grand jour ! Après une nuit réparatrice ponctuée de ronflements tonitruants (certains ont même entendu des loups hurler…), nous sommes réveillés par les mugissements claironnants d’un troupeau de Salers paissant à proximité des bungalows.
Aujourd’hui, c’est un run de 255 kms à travers le parc des volcans d’Auvergne qui nous attend. Nous ferons également des incursions dans le Cantal et en Lozère.
Le road-book qui nous a été remis est volontairement approximatif et seules les agglomérations de moyenne et haute importance y figurent. À charge pour les participants d’opter pour le meilleur itinéraire.
Cette année, COVID oblige, les check-points sont supprimés, et les « aces » seront remis aux participants dés leur retour sur le site principal.
Ce sont donc 1000 équipages qui s’élancent sur les routes. Il en vient de tous les coins de France et de Navarre, mais aussi de Belgique et de Suisse. J’ai même vu 5 ou 6 HD immatriculées dans une contrée pluvieuse et/ou embrumée où survit une tribu atypique, dont les membres se sont lancés dans la sculpture en glaise, se délectent de gelée à la menthe et conduisent du mauvais coté de la route. Je pense que l’un d’eux avait un probléme mécanique, mais malheureusement, je n’avais pas sur moi, mon jeu de clefs qui vissent à l’envers… c’est con hein !
La météo annonce 30°C sur les routes du massif du Sancy. Il est temps que ça se termine, car à ce rythme là, dans deux semaines, on se croira à Abou Dabi.
La route tient toutes ses promesses et c’est un pur bonheur que de les arpenter en zigzaguant entre les bouses. La petite séance de la veille porte ses fruits et je peux vous dire qu’à l’arrière, ça ne lambine (presque) pas !
Mais nous ne sommes pas dans la vitesse, rappelons le ! D’ailleurs, vu le nombre de motos empruntant le même itinéraire, il apparaitrait bien compliqué voire impossible d’enrouler du câble. Non, la priorité est donnée à la découverte de la région et à s’en mettre plein les mirettes. Mais il n’y a pas que les yeux qui demandent satisfaction. Les papilles, elles aussi, réclament leur dû.
Dans ce sens, Tom (qui rappelons le, souffre de polyphagie aiguë), avait émis le souhait que nous nous arrêtions dés que nous passerions devant une fromagerie artisanale, afin qu’il y fasse son petit marché. Qu’à cela ne tienne, alors que nous évoluions dans la pampa, au milieu de nul part, j’avise un panneau stipulant (Ici fabrication et vente de fromage fermier). Aussitôt vu, aussitôt béquillé !et voilà mon Tom, tout guilleret, qui s’engouffre dans l’antique bâtisse, marqué à la culotte par la dame-pilote, en quête elle aussi d’un claquos punais.
20 minutes plus tard, Tom réapparu, les bras chargés d’une tomme (Heureusement qu’il ne s’appelle pas meule…) et la chargea dans la meule de Sab (Heureusement qu’elle ne pilote pas une tomme…), sous prétexte qu’il n’avait plus de place dans ses sacoches. Très belle manœuvre du polyphage qui, sous un prétexte fallacieux, a réussi à ne pas empuantir sa sacoche, en refilant son frometon nidoreux à une âme pure incapable de voir le mal. Pour cela, je donne la note de 10…
Tandis que nous nous apprêtons à traverser la commune d’ Allanche, nous nous apercevons que toutes les aiguilles de la pendule sont sur le 12. il est temps pour nous de nous mettre en quête d’une gargote ! Le probléme, c’est que nous ne sommes pas les seuls à avoir eu cette idée là. Alors que tous les commerçants du bourg semblaient s’être donnés le mot pour jouer un remake de « La ville fantôme », je croise le chemin d’une troupe de « ducatistes » avec qui nous avions fait connaissance quelques kms en amont. Empressé à notre égard, leur chef de file nous indiquait alors où trouver une auberge qui propose un ris de veau à la crème et au coulis de champignons…
Arrivés sur le perron de l’établissement, celui-ci nous semblait fermé et je commençais déjà à faire le deuil d’une chére de roi lorsque, surgit de nul part un cuistot masqué, tout de noir vêtu. « Vous voulez boire un coup ou c’est pour manger » questionna-t’il ! « Les deux mon Général ! » lui rétorquais je. L’affaire était dans le sac, ça n’était pas aujourd’hui que nous souffririons de sous-nutrition.
Très à cheval sur les gestes barrières et hyper-respectueux des règles de distanciation physique, le personnel de service nous installent sur deux tables différentes, au milieu d’une salle qui, en temps normal, pourrait recevoir deux fois plus de clients.
Nous consultions le menu, lorsque tout à coup, sans que nous ayons eu le temps de comprendre ce qui se passait, Katia et Le Rusé se précipitaient à l’extérieur de l’établissement. Un temps ébaubis, nous comprîmes enfin de quoi il en retournait.
En effet, pendant que échangions entre nous en devisant sur le choix du menu, en face du restaurant, de l’autre côté de la rue, une dame d’un certain âge venait d’être victime d’une chute sur son balcon et peinait grandement à se relever. N’écoutant que son bon cœur, notre Katia nationale (qui est du signe Mère Thérésa 3éme décan, ascendant Gandhi) s’extirpa de l’assemblée et, d’un bond d’un seul, en moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire, se porta au chevet de celle que l’on croyait contuse. Dans le même temps, le Rusé (Epagneul 1er décan, ascendant bichon maltais), qui n’avait rien capté de la scène, suivit le mouvement par pur réflexe.
Sur place, nos Dr House et Rintintin d’un jour ont un éclairage sur ce qui s’est réellement passé.
La vieille, qui était beurrée comme un petit Lu, luttait comme elle pouvait contre la canicule ambiante et la déshydratation qui la menaçait. Pour ce faire, elle s’humectait régulièrement le palais à grands coups de picrate local. La source s’étant tarie et la pépie menaçant, elle s’est mise en quête de quérir un cubi de 10 litres de rosé stocké sur son balcon. Les dix mètres la séparant du graal lui paraissant des hectomètres et son centre de gravité en constante recherche de stabilité figurant aux abonnés absents, il arriva ce qui est arrivé.
Rassurée sur l’état de la soiffarde qui s’exprimait dans une langue morte dépourvue de toutes voyelles, mais ne présentait aucune blessure apparente, Katia pu rejoindre notre auguste assemblée. Dans le même temps, le Rusé qui lui aussi a fait preuve d’abnégation et de compassion à l’adresse de l’éponge, réfléchissait à ce qu’il pourrait tirer du cubi orphelin.
Les choses étant rentrées dans l’ordre, nous pûmes poursuivre nos agapes sans incident au Relais des Remparts. Si d’aventure vous passez dans le coin, n’ayez aucune hésitation, la table est excellente, le personnel est adorable et l’addition est douce.
Après cet interlude gastronomique, nous voilà « on the road again » comme y disent les cuiseux eud’ Jeanne d’Arc !
La dernière partie de l’itinéraire pour motocyclistes nous fait passer par Bagnols (sic), La Tour d’Auvergne ou encore le Mont-Dore. Dans l’ascension du col de la Croix-Morand les affres de la circulation font qu’accompagné de Laurent, que nous appellerons Fantomas (L’homme sans visage et aux cent prénoms…) tant il a cette faculté de passer inaperçu au yeux de ses contemporains, en changeant constamment de prénom selon son humeur, nous nous trouvons derrière un PL.
Nous nous apprêtions à le dépasser lorsque tout à coup, surgies d’on ne sait où, deux bécanes fabriquées au pays du soleil levant s’intercalent nerveusement. Le pilote de la première, sensiblement plus doué, saisit rapidement l’opportunité de doubler le mille-pattes. Il n’en est pas de même pour le second. Ce dernier semble pris de convulsions dans le poignet et le pied droits. Il occupe toute la largeur de la route en mettant moult coups de gaz pour ensuite freiner violemment, sans pour autant procéder au dépassement, alors que toutes les conditions de sécurité étaient réunies.
Après plusieurs minutes durant lesquelles notre « apprenti-samouraï en herbe » nous fait montre de son incapacité à gratter en côte un vulgaire bahut, je décide de passer à l’épisode suivant , et entame son dépassement. Et là, le ouistre me gratifie d’un superbe « Block pass… ». Après un freinage que je qualifierais « d’énergique », je me porte à la hauteur du matamore pour lui signifier mon étonnement, ma surprise, mon désappointement, ma déception, ma désillusion, mon chagrin et mon désenchantement, tout ça sans un mot et avec seulement un regard appuyé et une mimique faciale significative.
Le tranche-montagne, les yeux injectés de sang, me dit alors nerveusement quelque chose dans une langue que je ne maîtrise pas, avant de profiter d’un bout de droite pour enfin doubler le fardier.
Intrigué par un tel comportement et soucieux de sa santé, je me mets dans son sillage, tandis que Fantomas, tout sourire, enquille dans ma roue.
Faisant parler la poudre par le biais de son coursier aux yeux bridés, le jeune bravache me met aussitôt une pige, voire deux, tandis que mon enclume motorisée et moi gravissons la pente.
L’histoire aurait pu en rester là si un camping-car n’avait pas contrarié les ambitions de notre « Valentino Rossi des bacs à sable… ». Bloqué, pour les raisons que l’on connait, derrière la roulotte motorisée, Fantomas et moi fondons sur lui comme des éperviers sur une souris paralytique. Au moment où nous allions établir la jonction, le kamikaze de ducasse saute le bac à moules. Illico, nous faisons de même. Nous voilà maintenant sur une route dégagée et sinueuse à souhait et le poireau affiche la même maitrise que lorsqu’il est coincé derrière un véhicule. Il freine quand il faut accélérer, puis fait le contraire. Ses trajectoires sont presque carrées et, dans son rétroviseur, on peut voir son regard qui s’apparente à celui d’un cocker abandonné dans une cour emplie de rottweilers. À chaque virage, je me porte à sa hauteur pour prendre des nouvelles de sa santé, mais je sens bien qu’il y est insensible. Comme ce monde est cruel…
L’envie de le doubler en lui faisant l’intérieur me titille, mais la raison prend vite le dessus. Nous sommes là pour prendre du plaisir et surtout pas pour se blesser ou nuire à qui que ce soit.
Du coup, dans un moment de partage et de tendresse, j’ai eu envie de lui adresser ce petit poème.
Roule petit motard, roule.
Dans tes montagne, continue de t’entrainer
Un jour c’est sûr, tu auras les boules
Quand tous sauront, que par une HD tu t’es fait gratter.
Rapide coup d’oeil dans mon retro, Fantomas est toujours là, avec son indéfectible sourire. Il s’accroche le Rascal ! C’est un bon, je le verrais bien en safety…
De retour sur le site, nous nous accordons une dernière flânerie sur les stands.
Tandis que Giovannix, confortablement installé sur la selle d’une Béhème R.18 écoute patiemment un vendeur qui lui fait l’article en lui récitant son chapelet. Le reste de la troupe musarde devant les rayons tenus par les « marchands du temple ».
Pour cette dernière veillée, ce sera « Soirée pizza » et nous serons survolés d’à peine quelques dizaines de mètres par des montgolfières, contribuant ainsi à faire de ces moments, des instants magiques. Un peu plus loin, le concert se prépare et les bikers commencent à affluer.
Jour 4 : « Retour au bercail »
09h00, c’est l’heure que nous avions fixé pour définir le départ. Finalement, nous embrayerons trente minutes plus tard.
Après un solide petit-déjeuner à base de pain au ciment, agrémenté de miel et de confitures diverses, nous chargeons les motos. C’est fou comme on a toujours moins de place dans les sacoches au retour, qu’à l’aller. C’est quelque chose que je ne me suis jamais expliqué, mais un jour il faudra qu’on en parle…
Météo France nous annonce 32°C sur les routes aujourd’hui. Le pire, c’est qu’on n’a plus de place pour mettre les vêtements chauds dans le tour-pack, ça promet !
En même temps, on ne pourra pas se plaindre des conditions climatiques durant ce séjour. Soleil au beau fixe, température ambiante très agréable voire chaude (et même très chaude parfois…), routes sèches (sauf les bouses…) !
En mettant le cap sur le grand Nord, Archi a fait au plus simple et au plus rapide, en optant sagement pour l’emprunt d’un maximum d’autoroute.
La pause déjeuner se traduira par l’engloutissement d’un casse-dalle sur une aire de repos à proximité d’Orléans.
Arrivés aux portes de la capitale, Ti’Fred, qui se trouve être « le régional de l’étape », nous propose de jouer les poissons-pilotes, afin d’emprunter un raccourci censé nous faire gagner quelques kms, mais surtout pas mal de temps.
Tout se déroulait pour le mieux dans le meilleur des mondes, jusqu’à ce que, au beau milieu d’un tunnel, le trafic se retrouvait à l’arrêt suite à un accident corporel de la circulation. Décidément, les tunnels parisiens ne nous auront pas porté bonheur sur cette sortie !
Après avoir retrouvé l’A.1, nous faisons un complément de carburant, occasion de se dire au revoir, et chacun retrouve le chemin de ses pénates (Spéciale dédicace…!)
Un bien beau week-end que nous avons vécu là, en fait une véritable aventure partagée avec des gens vrais et formidables qui ont une passion commune.
Simplicité, gentillesse, rires, fous-rires, solidarité, cohésion sont quelques mots qui me viennent à l’esprit (à chaud!), après avoir vécu ces ACES EXPERIENCE 2020, mais il y en a bien d’autres et chacun saura trouver les siens.
Je ne saurais terminer ce « petit » résumé sans en citer une dernière fois les acteurs.
Gillou, son sourire permanent et sa sempiternelle bonne humeur malgré une mécanique capricieuse.
Katia, aux petits soins pour la troupe de grands enfants que nous sommes ainsi que pour sa disponibilité pour les préparatifs à notre arrivée.
La dame-pilote, on ne l’entend pas, mais elle n’est jamais loin. « La force tranquille » du groupe.
Archibald de la street, « L’homme des tunnels » qui s’est occupé des inscriptions et de la réservation des logement.
Christobal Le Rusé, un homme a l’esprit affuté, toujours prêt à naviguer à contre-courant en lançant une mode vestimentaire aussi improbable que révolutionnaire.
Jean-Mich’, un « pilier » incontournable de la vie en communauté.
Giovannix, Boulanger, pop-star, musicien, magicien, mécanicien… il sait tout faire, et surtout nous faire rire… Le couteau suisse, voire le Rémy Bricka du groupe.
Tom, le « Gossbo » du groupe (Du moins, c’est ce qu’il croit…), toujours prêt à dégainer une répartie…parfois improbable. Le sosie officiel de Malik Bentalha.
Obélix, athlète complet dont la discipline favorite est la course de relais (télécom).
Dédé, L’homme qui se réclame comme étant le sosie parfait de Lorenzo Lamas (De loin, la nuit et de dos…). Il prétend avoir été la doublure de Christophe Lambert dans « Highlander »… On ne doit pas avoir vu le même film…
Ti’ Fred, avec son look de hipster, on a là une personne emprunte à la jovialité, que l’on a plaisir à côtoyer. Son éloignement géographique dû à sa profession fait que nous ne le voyons que trop rarement.
Fantomas, discret, efficace et répondant toujours présent, c’est un pilote redoutablement efficace et un comparse exquis. Sa propension à se faire oublier sans se faire petit, fait que peu de gens connaissent son véritable prénom… allez, à plus Romain, Thierry, Antoine…. Hooo j’ sais pu…
Moi, mais il n’y a rien à dire. Ma modestie me l’interdit !
En attendant les ACES EXPERIENCE 2021 qui devraient encore monter en puissance, nous vous disons…
À bientôt pour de nouvelles aventures, avec le L.E.C. bien sûr !
E. G.